Petite question : est-ce que vous êtes torturés à l'idée de ne "rien faire de votre vie" ?
Moi oui. Je me demandes si c'est une constante humaine, si ça a un rapport avec notre société individualiste, ou si tout simplement c'est moi le problème.
Je me demandes, par exemple, si, en temps et lieu de l'hégémonie chrétienne (moyen-âge occidental, quoi...
) les serfs et autres paysans, qu'on bassinait avec des histoires du genre : vous faîtes parti d'un grand troupeau, et de toutes façons le royaume des cieux vous est ouvert, alors bossez et évitez de trop penser, je me demandes s'ils connaissaient cette angoisse.
Dans les fourmis de Werber (loué soit son nom
), les fourmis n'ont pas d'individualité, qui est même considéré comme une maladie, qu'évidemment attrape 103ème, ce qui l'embête au plus au point...
Je me demandes aussi, si, avec toutes ces $^%@¨# d'émissions dans la veine : "devenez une star le temps de le dire", où tout simplement "venez dire bonjour à la télé devant des miliers d'imbéciles", avec les blogs, avec pourquoi pas le libéralisme "soyez meilleurs que les autres", les idées du bonheur "ma maison, ma 4x4, ma piscine, mon, mon, mon et moi, moi, moi..." n'aurez pas non plus une influence là-dessus...
Et puis même, je me demandes qu'est-ce que c'est "remplir sa vie" ?
Des gens meurent en "n'ayant rien fait". Pourtant, c'est leur oeuvre collective qui fait tourner la société. Si Martine n'avait pas fait la caissière pendant 40 ans, pendant 40 ans les clients auraient attendu plus longtemps au magasin ou tout simplement quelqu'un d'autre que Martine aurait "perdu son temps", sans vraiment le perdre en fait.
On me dira remplir sa vie, c'est être heureux : aimer, être aimer, ça suffit...
Oui mais il y a autre chose. En fait c'est pas tant "remplir sa vie" que "laisser une trace". Et ça c'est autre chose. Et, tout en étant persuadé que ça n'a aucune sorte d'importance, que de toutes façons quand je serais crevé ben je serais pas là pour vérifier ce qui se passera, ben je continus à me torturer (et c'est vrai que ça me met vraiment mal à l'aise, parfois)...
Alors, arêter d'y penser ? Je suis persuadé que trop penser n'est pas forcément ce qu'il y a le mieux au monde. Quand je vois des imbéciles de moutons, je me dis parfois qu'ils ne connaissent pas ces problèmes. Sauf que sans doute ils en connaissent bien plus que moi, et qu'en tout cas ils ne les prennent pas, disons, "avec philosophie", et donc ça doit leur pourrir la vie (bien fait
).
Sinon, les blogs et journal intime, ça permet de laisser une trace...
L'important n'est pas tant que quelqu'un, plus tard, les lise, mais que quelqu'un, plus tard, puisse les lire...
En même temps, cette envie de "laisser une trace" ne vient-elle pas de cet impression d'être unique ? Mais unique à quel point ? Dans des émissions, de gens étale leur banalité de vie... mais ça n'est pas ça, leur unicité, ça on s'en fout...
Enfin bon, chez vous, ça se passe comment ?
PS : au fait, "laisser une trace" ça peut être la célébrité (et associé...), mais ça peut être créer : j'imagine ce que ça doit être jouissif de publier un livre avec son nom marqué dessus
. Aprsè on s'étonne que de nos jours, tout le monde se mette à écrire et que chaque année sortent 500 bouquins qui ne seront lu que par 500 personnes (et je ne parle pas du Grimoire, etc... même si je dis pas qu'on écrit pour la gloire
)