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Le grimoire d'Ulfer

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 Sujet du message: Brassens
MessagePosté: Mer Nov 08, 2006 7:53 pm 
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Homo sapions sapions

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Bon, je mets un bout de mon dossier de première sur Brassens, comme l'avait d'ailleurs demandé Emma.... le style n'est pas fabuleux et ne correspond sans doute pas avec ce que je serai capable de faire maintenant, m'enfin voilà... (et j'avais eu une note presque divine je crois... :mrgreen: )
et puis, c'était pour du français, évidemment, donc.... :mrgreen:

Biographie anecdotique de George Brassens

Une anecdote qui peut sembler particulière dans la vie de Brassens est que sa femme et lui ne se sont jamais mariés et n’on jamais partagé le même toit, bien que Brassens dira d’elle : « Ce n’est pas ma femme, c’est ma déesse . En fait, l’explication est simple mais politique ; pour lui et ses idées anarchistes, il faut combattre l’idée de propriété que fait naître le mariage entre les époux, ne pas considérer son conjoint comme un meuble mais comme un être moralement indépendant auquel il faut, malgré le degré d'intimité que provoque le mariage, toujours respecter la personnalité et l'humeur. Ainsi, Brassens voulait faire durer sa relation à jamais, et ce en évitant les querelles de couples fréquentes si l’on vit sous un même toit et n’habitant pas avec sa « concubine »Il évoque cela dans une chanson, La non-demande en mariage dont voici un extrait :

On leur ôte bien des attraits
En dévoilant trop les secrets
De Mélusine
L'encre des billets doux pâlit
Vite entre les feuillets des
Livres de cuisine.


En plus d’être anarchiste, Brassens était un pacifiste convaincu : pourtant, il était fasciné par les armes à feu. Une anecdote raconte même qu’il aurait failli acheter un canon dans un catalogue. On peut faire le lien avec le fait qu’avant de se coucher, il vérifiait que sa porte était bloquée par une plaque d’acier, et qu’une corde était bien attaché dans sa chambre pour fuir par la fenêtre en cas d’incendie. . Tout reste pure supposition, mais accrocher des armes dans sa chambre s’accorde très bien avec ses manies sécuritaires ; ce comportement pourrait avoir pour origine un sentiment d’insécurité étrange, ayant peut-être un lien avec ce qu’il a vécu pendant la guerre et son enrôlement forcé par le STO et qui aurait eu un impact psychologique sur Brassens et entraîné cette paranoïa.

Un autre trait particulier de la personnalité de Brassens, c’est son mépris pour l’argent et combien il lui accorde peu d’importance. Il dit à J. Chancel : « Si je gagnais très mal ma vie ne faisant ce que j'aime, je continuerai à le faire ! » Pour Brassens, ce qui compte c’est d’abord de se faire plaisir, à lui, mais aussi à son public et à son entourage. L’argent est le bienvenue mais accessoire ; c’est pierre Ontiente qui le convaincra d’ouvrir un compte. Brassens accepte puis il ne s’en occupera plus jamais, laissant Pierre gérer son argent et payer ses impôts. Le chanteur se produit partout car il est demandé partout, pas pour l’argent. Il est d’ailleurs très généreux avec son entourage et leur paye des maisons et une multitude d’autres choses. Bien entendu, il achètera pour lui des livres, une voiture, des maisons à la campagne, mais il est poussé par ses envies et non par le prix : il a de l’argent, donc il s’en sert. Sa relation avec le vénal s’arrête là.


La personnalité de Brassens se retrouve beaucoup dans ses chansons ; provocateur sans être vulgaire mais néanmoins contestataire. Nous allons en avoir l’exemple par le commentaire de trois chansons : Le Gorille, La Mauvaise réputation et L’Epave.

La mauvaise réputation

Ce texte m’a plus dès l’avoir écouté chanté par Brassens. Il expose ce trait peu flatteur de la société qu’est le rejet de la différence chez une personne, et ce, de manière si simple et si humaine, que nous aussi cela nous révolte. Je vais commenter ce texte en tenant compte de cette appréciation selon deux axes : La différence, source d’intolérance et Un narrateur persécuté dont l’auditeur se sent proche, pour expliquer le système de dénonciation qu’utilise Brassens. A noter qu’étant anarchiste, Brassens s’est sans doute mis dans la peau du narrateur, et que l’état d’esprit de son époque rendait son texte plus provocateur qu’aujourd’hui…

Le narrateur expose la situation dès le début en annonçant « Au village, sans prétention, J'ai mauvaise réputation. »; on n’en connaît pas encore la cause, mais le thème de la différence est déjà présente : avoir mauvaise réputation rend le narrateur déjà différent des autres habitants du village. Le « sans prétention » est une assurance de véracité, et que ce n’est pas de la vantardise. Seulement, personne n’irait se vanter d’avoir une mauvaise réputation : si tel est le cas, cela veut dire que c’est une qualité rare, sinon il peut s’agir d’une ironie de la part de l’homme qui prendrait cela avec humour et philosophie. Dans les deux cas, le narrateur est unique en son genre : dès le début, on sait que l’on a à faire à une personne peu commune et différente.
Le texte est divisé en quatre parties selon une certaine chronologie : la première annonce la situation et introduit l’explication, et la quatrième conclut sur le texte, tandis que la deuxième et la troisième expose deux exemples de situations pour expliquer en partie la mauvaise réputation que s’est acquise le narrateur :
« Le jour du Quatorze Juillet, Je reste dans mon lit douillet » Cela choque que cela soit une des causes de la mauvaise réputation de l’homme ; cela semble un peu ridicule et stupide de médire sur quelqu’un juste à cause de cela, bien qu’à l’époque, ce manque de patriotisme était assez mal vu. Qui n’a jamais fait la grasse matinée un jour férié, même le quatorze juillet ? Il en va de même pour le deuxième exemple ; laisser courir un voleur de pomme n’est pas un grand mal. Pour le narrateur, c’est synonyme de bonté et de compréhension pour sa malchance : « voleur malchanceux » il insulte même son poursuivant « poursuivi par un cul terreux », ce qui est la seule insulte qu’il profère dans le texte, préférant d’habitude la formule « Mais les brav's gens n'aiment pas que l'on suive une autre route qu’eux », phrase qui confirme toujours de l’opinion des habitants, le faux pas avéré du narrateur.. La différence paraît étonnante et minime, si bien que c’est les autres habitants du village qui nous apparaissent alors différent du narrateur, et non l’inverse. Comme nous allons le voir, cela contribue même à nous identifier et à nous rapprocher de lui.
A chaque fin de parties, on a un aperçu de l’attitude des habitants du village envers l’homme. Au fur et à mesure des actions du narrateur, elle devient de plus en plus violente ; d’abord on médit de lui, puis on le montre du doigt, on se rue sur lui et enfin on va le pendre ! L’intolérance se fait croissante, mais l’ironie du lecteur reste la même ; il effectue toujours une pirouette humoristique à la fin des parties : « Tout le monde se rue sur moi, Sauf les culs-de-jatte, ça va de soit. » C’est un des traits du narrateur qui nous le rend sympathique.

Par beaucoup d’aspects, le narrateur nous paraît sympathique, et nous nous identifions à lui. Il emploi un langage simple et gentillet : « en suivant mon chemin de petit bonhomme » Sa façon de parler et de se disculpé en utilisant des exemples choquants de l’intolérance des habitants nous rapproche de lui. L’injustice et l’intolérance des autres habitants paraissent déplacée et passe pour de la persécution ; le narrateur vit sa vie tranquillement et comme il l’entend, sans imiter les autres habitants du village et sans commette de délits « en suivant mon chemin de petit bonhomme » Il fait tout pour s’intégrer et pour ne pas être rejetés ; « Qu’je mdémène ou qu’je reste coi Je pass’ pour un je-ne-sais-quoi ! » Et pourtant, à chaque fin de partie, l’animosité des habitants évolue envers lui jusqu’à atteindre la volonté de pendre l’homme, tout cela à cause du fait qu’il dort le matin du quatorze juillet et qu’il laisse courir les voleurs de pommes. Le narrateur apparaît alors comme persécuté pour pas grand chose et l’auditeur se sent bien plus proche de lui que des habitants, tout simplement parce qu’il est plus « humain » qu’eux, et qu’il y a une injustice flagrante dans l’attitude des « brav’s gens » Cette même expression, « brav’s gens » est plutôt à connotation péjorative car elle désigne tout le monde sauf le narrateur, qui pourtant nous est sympathique.
Il y a une prise en pitié du narrateur, comme une envie de le défendre, d’autant plus que celui ci ne se plaint pas de cette situation, allant jusqu’à l’ironie « Tout l’mond’ viendra me voir pendu, Sauf les aveugles, bien entendu. » La phrase « les brav’s gens n’aiment pas que L’on suive une autre route qu’eux » est prononcée sur un ton sarcastique qui nous met également du côté du narrateur. Elle résume l’attitude des habitants qui à la fin veulent pendre le narrateur pour un motif aussi futile ; ils nous paraissent antipathiques, et étant donné que du point de vue du narrateur, nous sommes dans le tas, on se révolte pour le contredire, peut être inconsciemment, contre l’attitude des gens envers lui.


Pour conclure, on peut dire Brassens nous rapproche du narrateur pour nous éloigner des personnes qu’ils visent, c’est à dire les habitants du village qui est une allégorie des personnes renfermées sur elles-même et intolérants, persuadées que leur conduite est celle à adopter et qu’il ne peut en exister d’autres. Il nous invite à rester « humain » et à ne pas leur ressembler.


Le Gorille

Cette chanson m’a plue de par ses différents aspects et sa structure de poupée russe. Elle adopte un ton léger et joyeux avec des paroles amusantes et friponnes, ce qui m’a d’abord attiré, mais aussi à l’intérieur de cette histoire, il y a comme une morale, et il y a aussi la critique et la désapprobation de Brassens sur la peine de mort, aspects qui n’arrivent qu’après quelques instants de réflexion…Je vais essayer de répondre à la question Comment Brassens dénonce-t-il la peine de mort ? selon deux axes : Une symbolique des femmes et du gorille et Dénonciation de la peine de mort par Brassens.

Brassens fait un portrait peu flatteur des femmes ; il les désigne sous un nom plus animal que respectueux : « les femelles du canton » et leur attribuent des défauts « avec impudeur » « ces commères » et utilise des sous-entendus « lorgnaient même un endroit précis » tout en restant courtois et simple « que, rigoureusement ma mère, m’a défendu de nommer ici… . A peine la « féminine engeance » sait que le singe est puceau, elles fuit, et Brassens les raillent et leur attribuent de nouveaux défauts : « prouvant qu’elles n’avaient guère de la suite dans les idées. Il souligne tout au long du texte la lubricité des femmes et leur animalité. « Supérieur à l’homme dans l’étreinte, Bien des femmes vous le diront » Cette dernière phrase est représentative de l’idée des femmes que Brassens veut faire passer ; dépravées et avec des mœurs plutôt inavouables ; peut-être une référence à Candide de Voltaire et la scène des singes amants des deux dames?
Le gorille apparaît alors supérieur aux femmes car celle ci sont comparées à des animaux, tandis que lui est personnifié et humanisé, car Brassens le fait parler « C’est aujourd’hui que je le perds » et lui attribue des qualités, contrairement aux femmes « le bel animal » « supérieur à l’homme dans l’étreinte »
Ce retournement de la réalité sert à Brassens pour exprimer ses idées et opinions ; on peut interpréter les femmes comme les personnalités qui sont pour la peine de mort, et dont Brassens dresse volontairement un portrait peu flatteur, à travers ses mots légers et amusants, pour critiquer cette pratique. Le Gorille est comme le bras virtuel et accusateur de Brassens dans l’histoire, qui lui sert à punir ces personnalités tout en exprimant son opinion. La fuite des femmes face au gorille est une victoire sur la peine de mort.


Le Gorille, voyant toutes les femmes partir, se tourne alors vers le juge et la centenaire. Le juge est décrit comme « un jeune juge en bois brut » et « impassible » ; il est sûr que le gorille ne lui fera rien : « Qu’on me prenne pour une guenon, c’est complètement impossible ». Il représente la loi et dépend d’elle ; il est donc sûr de son bon droit : pour résumer sa pensée : la loi autorise la peine de mort, donc je peux l’applique sans crainte.
La centenaire elle est nostalgique et pense que « qu’on puisse encore me désirer, ce serai extraordinaire, et pour tout dire inespéré » représente le traditionalisme.
Ainsi, le gorille qui est, rappelons le, le bras vengeur et accusateur de Brassens, a le choix entre deux victimes, symboliquement, deux suspects : le traditionalisme et les personne âgées représentée par la centenaire, et la Loi, représenté par le juge. Symboliquement, la guenon est le coupable, ultime responsable de l’existence de la peine de mort.
Brassens, par cette allusion « Au lieu d’opter pour la vieille, comme l’aurait fait n’importe qui… »nous fait comprendre que le gorille, qui choisit le juge, que ce n’est pas un hasard et qu’il y a une bien plus forte raison que la préférence qui est la cause du choix.
Le gorille choisit le juge, donc pour Brassens, c’est la Loi qui doit changer et abolir la peine de mort. L’expression « il saisit le juge à l’oreille » n’est peut être pas innocente et en rappelle une autre, « tirer les oreilles », métaphore pour la punition !
Son avis et cette signification se confirment ensuite ; Brassens commente la punition du juge avec beaucoup d’amusement et de plaisir : « la suite serait délectable[…] Ça nous aurait fait rire un peu »
Enfin, il y fait tout à la fin une allusion directe : « Criait : maman !, pleurait beaucoup, comme l’homme auquel, le jour même, il avait fait trancher le cou. »

C’est ainsi qu’un texte qui peut nous paraître pâlissant et pas sérieux, fripon au possible et amusant peut se révéler un texte de dénonciation de la peine de mort ; « Gare au gorille !… »

L’Epave


Voilà une fable mise en chanson ; je l’ai choisie pour son originalité, comme le sont la plupart des chansons de Brassens, et car l’étrange personnalité du clochard-narrateur m’intéressait. Mais, Quelle message et quelle morale Brassens veut-il nous faire passer ? Je vais y répondre par deux axes ; Une société miséreuse et opportuniste et La singularité et une morale.

Le narrateur est un homme dont nous apprenons d’abord qu’il boit « De son établiss’ment j’étais l’meilleur pilier » et tout au long du récit, au fur et à mesure qu’il perd ses habits, on s’aperçoit combien il est mal habillé au départ « l’état piteux de mes godasses », mais en même temps que cette descriptions de ses affaires, il y a aussi une exposition d’une partie de ses malheurs : « D’un homme heureux, c’était loin d’être la chemise » « mille et un coup de bottes ont tant usé le fond. L’homme est donc un clochard, qui en plus de ses malheurs se fait voler jusqu’à se retrouver nu.
Il se fait ensuite voler par tous ceux qui l’aperçois par des gens tous ici d’un milieu défavorisé : « Un certain va-nu-pieds », « un étudiant miteux », « La femm’ d’un ouvrier » Ils sont sans doute aussi malheureux que lui, et pourtant, au lieu de s’entraider, sont opportunistes au point de voler ses habits !
Cette piteuse vision de l’humanité est relevée par l’attitude singulière du voleur qui prend en pitié ceux qui le volent car ses affaires sont trop vétustes pour eux : « Un étudiant miteux s’en pris à ma liquette […] Je l’plains de tout mon cœur, pauvre enfant, s’il l’a mise… » On a bien l’impression que s’i il avait eu de plus beaux vêtements, dans sa bonté il se serait laissé voler.
Le clochard trouve singulier, non pas le fait de le voler, mais de voler ses habits abîmés qui ne valent rien : il y a une banalisation du vol, de plus, l’état de misère dans lequel les voleurs doivent être plongé pour en être réduit à voler un clochard aussi mal vêtu doit être terrible. On a donc dans ce texte l’exposition d’un chaos où chacun lutte pour survivre, où la misère est partout présente, et où la bonté est un défaut, et la solution arrive ensuite…

Une fois nu, le clochard est alors aidé par un agent de police qui le couvre de sa pèlerine. Le représentant de la loi arrive en sauveur, ce qui étonne encore le clochard « Ça ne fait rien, il y a des flics biens singuliers… »
C’est alors qu’il lui en est reconnaissant au point de ne plus réussir à crier « Mort aux vaches » : « J’essaye bien encore, mais ma langue honteuse retombe lourdement dans ma bouche pâteuse » Et là encore, il dit « Ça ne fait rien, nous vivons un temps bien singulier… »

Si l’on interprète tout cela, tous les évènements avant l’arrivée du policer, c’est le chaos qui arriverait à la société, sans doute représenté par le clochard, si il n’y avait la police pour faire régner l’ordre. Brassens est un anarchiste, mais pour lui, il faut tout de même qu’un certain ordre règne : cette chanson est donc peut être à visée politique…


Je vous fait grâce de la conclusion :mrgreen:

_________________
« Mais alors si ce n’est pas ici, où est-ce l’enfer ? »
Et une petite voix ricanante répondit à cette interrogation depuis les tréfonds de sa conscience :
« Là où sont les gutums bien sûr. »

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